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fait à un frère. Le Bulgare, après s’être rassasié, nous dit que leur nourriture manquait très souvent. Les nôtres l’invitèrent à venir chaque soir prendre sa part de pain qu’on lui garderait, et le Bulgare revenait, chaque soir à la même heure, manger et retournait dans son camp. Au fur et à mesure la sympathie vint. Nos soldats lui taillèrent les cheveux, le rasèrent, et lui donnèrent de quoi coudre ses habits. Celui qui le soignait le plus était justement celui qui sous l’impression du livre de Loti avait annoncé qu’il mangerait tout cru le premier Bulgare qu’il attraperait.

Un jour, le Bulgare ne vint pas ; on garda sa part pour lui remettre à son arrivée. Il revint le lendemain, mais il nous dit que c’était la dernière fois, car son officier s’étant aperçu qu’il venait au camp turc, l’avait fait battre et lui avait défendu de venir chez nous prendre son pain…