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tenant que je savais, je partis en courant pour aller retrouver ma mère…

Mais, du bas de l’escalier qui conduisait à sa chambre, j’entendis déjà ses sanglots… Oh ! l’entendre pleurer ainsi, elle, je n’avais jamais connu cela ni même imaginé cela, et je ne m’approchai plus qu’à petits pas craintifs ; c’était la première fois depuis mon arrivée au monde que le malheur s’abattait sur nous, et j’étais très novice en souffrance.

Ma mère, affaissée dans un fauteuil, avait encore son manteau et son chapeau dont je la vis dénouer les brides avec un geste impatient. Je crois que je jetai un regard de haine à la pauvre vieille Parque innocente qui était assise devant elle, contemplant le mal qu’elle venait de lui faire, et puis, je m’assis sur un tabouret à ses pieds, le visage enfoui dans les plis de sa robe, à la manière des tout petits, quand ils sont en détresse. Elle, ma mère, avait laissé tomber une main, encore gantée pour la rue, jusqu’à mes cheveux et serrait un peu ma tête