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de figures antiques. Là, souvent, au milieu d’une petite cour d’amies, d’élèves, de modestes admirateurs et admiratrices, elle trônait avec la plus spirituelle bonne grâce, ne quittant pas sa palette ni son long bâton mince, qu’elle tenait d’une façon très élégante dans sa main toute petite. (On était encore à l’époque du « bâton » qu’avaient pratiqué tous les peintres d’autrefois pour s’appuyer le poignet ; on ignorait ces taches de couleur, boueuses, informes, par lesquelles aujourd’hui on arrive beaucoup plus facilement et plus vite à des semblants d’effets ; la peinture était restée honnête, dans le sens attribué par Ingres à un tel mot ; c’est pourquoi le bâton semblait toujours nécessaire, pour donner au coup de pinceau sa décision et sa netteté.)

Une des visions d’elle dans son atelier, qui est restée le plus ineffaçable de mon souvenir, date de cette année-là et d’un beau matin de mai, le premier matin où nous était arrivée tout à coup la grande chaleur lumineuse de