Page:Loti - Prime Jeunesse, 1919.djvu/256

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’attardai dans le silence, en méditation profonde, et j’y sentis comme un appel, un reproche de ces ascendants inconnus, persécutés jadis pour la foi qui commençait de chanceler beaucoup dans mon âme.

Le lendemain, qui tombait un dimanche, j’allai au temple avec mes tantes. Les robes de soie noire qu’elles avaient mises, peut-être les dernières robes de soie qu’elles possédaient, m’émurent d’une tendre pitié, parce que la couleur tournait déjà un peu au rouge, et je m’attendais à voir la pauvre étoffe élimée, à bout d’usage, se fendre sur les cercles de leurs crinolines.

Ce petit temple de Saint-Pierre n’avait pas cessé d’être un lieu sacré pour moi. Rebâti vers 1830, sur un terrain qu’avait donné l’un de mes arrière-grands-oncles, il était tout blanc de chaux, cela va sans dire, et infiniment simple ; à l’intérieur, le bois de ses rangées de bancs à dossier et sa chaire pour le prêche étaient cirés avec un soin minutieux, et une