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filles, mes tantes à la mode de Bretagne, déjà d’une soixantaine d’années et les cheveux très gris, mais qui cependant se coiffaient d’une manière moins archaïque.

Leur intérieur de quasi-misère avait des meubles Louis XIV ou Louis XV, on ne peut plus simples pour leurs époques, mais qui venaient tous de notre famille, et rien de moderne ne détonnait nulle part ; aussi les chambres de leur maison m’inspiraient-elles un respect charmé, comme des recoins intacts des temps révolus.

Le bruit de mon arrivée s’étant vite répandu dans le quartier, je vis bientôt venir de bonnes vieilles gens en costume de l’île, qui avaient été des vignerons, des saulniers, des saulnières de mes grands-parents et qui m’appelaient encore « notre petit maître » ; je reçus même une visiteuse à bâton, une certaine vieille Augère, pour moi très vénérable parce qu’elle avait été la nourrice de maman, et qui, pour me faire honneur, avait mis la plus haute de