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indulgents de mes amis inconnus ne pourraient s’empêcher de sourire…

Après dîner, au chaud crépuscule, quand déjà les chauves-souris tournoyaient, nous allâmes, tante Eugénie et moi, en pensant à Lucette, nous asseoir dans le jardin sur un banc de pierre abrité et embaumé par un vieux jasmin tout en fleurs. À ce moment l’angélus se mit à tinter là-bas au clocher roman du village d’Échillais, et le son de cette cloche, à lui seul, était évocateur de tout un passé : de plus, juste en face de nous, s’alluma l’étoile Polaire, l’étoile de Lucette, — l’étoile que pendant son mortel séjour à la Guyane nous nous étions entendus, elle et moi, pour regarder ensemble à la même heure et qui ce soir surgissait là tout à coup comme pour mieux la rappeler à mon souvenir…

L’étoile Polaire, pendant mon enfance je la considérais comme l’un des signes les plus éternellement immuables du ciel, pouvant même peut-être communiquer un peu de sa