Page:Loti - Prime Jeunesse, 1919.djvu/242

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cela, avant de me mettre à table dans la si vieille salle à manger aux épaisses murailles, je demandai la permission d’aller seul en courant jusqu’à l’entrée des bois, que j’avais trop hâte de revoir.

Le soleil se couchait quand je pénétrai sous ces chênes vieux de plusieurs siècles, un soleil rouge comme braise, qui était agrandi et ovalisé par la réfraction des épaisses vapeurs chaudes du soir, un énorme soleil déjà très bas que l’on apercevait à travers la futaie et qui semblait descendre au ras du sol pour incendier les bruyères. Quel silence et quelle paix, dans ce lieu toujours pareil que je revoyais avec un sentiment presque religieux ! Avoir quitté hier Paris, le tapage des boulevards, et me retrouver ici tout à coup, au milieu de mes rêves d’enfance !… L’émotion fut pour moi si poignante que je la notai le lendemain sur mon cahier secret, mais je n’ose reproduire ce passage, écrit avec tant d’exagération et même tant de lyrisme que les plus