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nouement inévitable survint, parmi des fouillis de branches et de roseaux pareils à ceux de mon rêve, dans le ravin ombreux des grottes, au milieu d’un essaim de très fines libellules qui semblaient aussi impondérables que des petites plumes et qui, pour la fête de notre hyménée sans doute, s’étaient somptueusement vêtues de pierreries et de gaze d’or, les unes en bleu, les autres en vert. J’étais venu m’installer là, dans la nuit verte, parce que je savais qu’elle y cueillait d’habitude ses joncs ; pour me donner contenance, j’avais apporté mes crayons et mon bloc de dessin, et, rien qu’en l’apercevant de loin arriver de son allure souple, par le sentier le long des rochers en muraille, j’avais pressenti la minute suprême qui finirait ma vie d’enfant.

En effet, si ce n’était pas moi qu’elle voulait, pourquoi s’approchait-elle ainsi, cauteleusement, sans me quitter des yeux, mais avec les petits détours d’un chat qui craint d’effaroucher sa proie ?… Je commençais de trembler et de ne