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XXV

Pour aller prendre le mauvais petit bateau économique de la Charente, je traversai la ville, muette à cette heure-là, et surchauffée par le soleil. J’étais triste, un peu humilié peut-être de ce départ de pauvre, et aussi de mes vêtements de l’an dernier, défraîchis et trop courts ; mais ce n’était rien auprès d’une angoisse inexpliquée que je subissais, angoisse comme de désir et d’attente ; pour la première fois depuis seize ans que j’existais, j’avais cruellement la perception très nette de m’avancer seul dans la vie éphémère ; j’aspirais donc à je ne sais