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Il arrivera, oui, ton mercredi soir, et il passera, et il en arrivera d’autres, dans ta vie, des soirs ou des matins, plus désirés encore que celui-là, qui t’auront donné l’illusion de devoir t’apporter des petites délivrances… ou même des grandes… mais qui sans doute…

Elle s’arrêta et je vis sa figure changer, ses yeux se dilater comme pour regarder dans le lointain de ses souvenirs… Sans avoir eu besoin de finir sa phrase, elle venait de me donner un aperçu, tout nouveau pour moi, du néant de la vie, du néant de l’avenir et de l’espoir ; en même temps un indice, un soupçon m’était venu de ce qu’avaient pu être jadis ses déceptions de cœur, et de ce que pouvaient être maintenant les tristesses de son existence enclose, pauvre vieille fille sans joies, qui volontairement s’était sacrifiée pour nous tous !… N’était-elle pas un peu tyrannisée par sa maman, ma grand’mère, pourtant bien bonne, mais qui se faisait soigner comme un bébé ? Et tyrannisée aussi par moi, cette pauvre « tante