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sance, aux fenêtres toujours fermées depuis plus de cent ans. Je veux aussi noter certain ravin où se passa, l’année d’après, la scène la plus troublante de ma vie d’adolescent ; sur une longueur d’un kilomètre ou deux, ce ravin, qui ne tarda pas à devenir mon royaume favori, coupe comme une déchirure le vieux sol pierreux de Saintonge et entretient dans son repli ombreux toute une végétation d’eau, en contraste absolu avec celle des plateaux d’alentour ; là, dans la nuit verte, c’est le domaine des mousses merveilleuses, des roseaux grands comme des bambous et des fougères géantes ; la grande osmonde en particulier y devient presque arborescente et je ne connais dans nos climats aucun lieu ayant autant que celui-là des aspects de marais tropical. En outre, dans la muraille de rochers qui l’entoure, s’ouvrent en rang des espèces de porches d’église donnant accès à la nuit souterraine : des grottes, festonnées par la fantaisie millénaire des stalactites et dont l’alignement forme comme une