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perruche d’Yves, un matin de grand vent où l’on prenait le second ris aux huniers. Elle se laissa écraser, par insouciance, entre le mât et la vergue.

Yves, qui entendit son cri rauque, vola à son secours, mais trop tard. Il redescendit de la hune, rapportant dans sa main sa pauvre perruche morte, aplatie, n’ayant plus forme d’oiseau, un mélange de sang et de plumes grises, au-dessus duquel remuait encore une pauvre patte crispée.

Yves avait du chagrin, je le voyais bien dans ses yeux. Mais il se contenta de me la montrer sans rien dire, en mordant sa lèvre dédaigneuse. Puis il la lança à la mer, et le requin qui nous suivait la croqua comme une ablette.

XV

En Bretagne, l’hiver de 1876. La Sibylle était rentrée à Brest depuis deux jours, — après avoir fini son tour complet par en-dessous, — et j’étais avec Yves, un soir de février, dans une diligence de campagne qui nous emportait vers Plouherzel.

C’était un recoin bien perdu que ce pays de sa