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LXXVII

Toulven, octobre 1881.

… Encore la pâle Bretagne au soleil d’automne ! Encore les vieux sentiers bretons, les hêtres et les bruyères. Je croyais avoir dit adieu à ce pays pour longtemps, et je le retrouve avec une singulière mélancolie. Mon retour a été brusque, inattendu, comme le sont souvent nos retours ou nos départs de marins.

Une belle journée d’octobre, un tiède soleil, une vapeur blanche et légère répandue comme un voile sur la campagne. C’est partout cette grande tranquillité qui est particulière aux derniers beaux jours ; déjà des senteurs d’humidité et de feuilles tombées, déjà un sentiment d’automne répandu dans l’air. Je me retrouve dans les bois connus de Trémeulé, sur la hauteur d’où on domine tout le pays de Toulven. À mes pieds, l’étang, immobile sous cette vapeur qui plane, et, au loin, des horizons tout boisés, comme ils devaient l’être au temps anciens de la Gaule.