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LXVIII

Dimanche, 31 mars 1881.

Toulven, au printemps ; les sentiers pleins de primevères. Un premier souffle un peu tiède passe et surprend délicieusement, passe sur les branchages des chênes et des hêtres, sur les grands bois effeuillés, et nous apporte, dans cette Bretagne grise, des effluves d’ailleurs, des ressouvenirs de pays plus lumineux. Un été pâle va venir, avec de longues, longues soirées douces.

Nous sommes tous sortis sur la porte de la chaumière, les deux vieux Keremenen, Yves, sa femme, et puis Anne, la petite Corentine et le petit Pierre. Des chants d’église, que nous avions d’abord entendus dans le lointain, se rapprochent très lentement. C’est la procession qui arrive d’un pas rythmé, la première procession du printemps. — La voilà dans le chemin vert, — elle va passer devant nous.

— Monte-moi, parrain, monte… dit petit