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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

à leur trou, avec des suites d’un kilomètre de long, avec encore des flûtes et des gongs, d’innombrables lanternes et des emblèmes dorés qui se louent très cher ; on se ruinera ensuite pour les monuments et les offrandes ; on ne dormira plus, de peur de les voir revenir. Je ne sais qui a si bien défini la Chine : « Un pays où quelques centaines de millions de Chinois vivants sont dominés et terrorisés par quelques milliards de Chinois morts. » Le tombeau, partout et sous toutes ses formes, on ne rencontre pas autre chose dans la plaine de Pékin. Quant à tous ces bocages de cèdres, de pins et de thuyas, ce ne sont que des parcs funéraires, murés de doubles ou de triples murs, chaque parc le plus souvent consacré à un seul mort, qui retranche ainsi aux vivants une place énorme.

Un lama défunt, chez lequel je pénètre aujourd’hui, occupe pour son compte deux ou trois kilomètres carrés. Dans son parc, les vieux arbres, à peine feuillus, tamisent légèrement ce soleil chinois, qui, après la neige