d’or à sa coiffure… Il est une seule chose qu’elle n’a pas le droit de toucher : son diadème.
Ce lourd diadème de brillants, qui remplace chez nous le piquet de fleurs des Européennes, l’usage veut que, pour le placer, on choisisse parmi les amies présentes une jeune femme ne s’étant mariée qu’une fois, n’ayant pas divorcé, et notoirement heureuse en ménage. Elle doit, cette élue, dire d’abord une courte prière du Coran, puis couronner de ses mains la nouvelle épouse, en lui présentant ses vœux de bonheur, et en lui souhaitant surtout que pareil couronnement ne lui arrive qu’une fois dans la vie. (En d’autres termes, — vous comprenez bien, André, — ni divorce, ni remariage.)
Parmi les jeunes femmes présentes, une semblait tellement indiquée, que, à l’unanimité, on la choisit : Djavidé, ma bien chère cousine. Que lui manquait-il, à celle-là ? Jeune, belle, immensément riche, et mariée depuis dix-huit mois à un homme réputé si charmant !
Mais quand elle s’approche, pour frapper son bonheur sur ma tête, je vois deux grosses larmes perler à ses paupières : « Ma pauvre chérie, me dit-elle, pourquoi donc est-ce moi ?… J’ai beau n’être pas superstitieuse, je ne pourrai jamais me consoler de t’avoir donné mon bonheur. Si dans l’avenir tu es appelée à souffrir comme je souffre, il me semblera que c’est ma faute, mon crime… » Alors, celle-là aussi, en apparence la plus heureuse de toutes, celle-là aussi, en détresse !… Oh ! malheur sur moi !… Avant que je quitte cette maison, personne donc n’entendra mon cri de grâce !…
Mais le diadème est placé, et je dis : « Je suis prête. » Un grand nègre s’avance pour prendre ma traîne de robe, et, par des couloirs, je m’achemine vers l’escalier. (Ces longs couloirs, nuit et jour garnis de servantes ou d’esclaves, qui précèdent toujours nos chambres, André, afin que nous y soyons comme en souricière.)