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LIV


À son arrivée en France, il reçut ces quelques mots de Djénane :


Quand vous étiez dans notre pays, André, quand nous respirions le même air, il semblait encore que vous nous apparteniez un peu. Mais à présent vous êtes perdu pour nous ; tout ce qui vous touche, tout ce qui vous entoure nous est inconnu,… et de pus en plus votre cœur, votre pensée distraite nous échappent. Vous fuyez, — ou plutôt c’est nous qui pâlissons, jusqu’à disparaître bientôt. C’est affreux de tristesse.

Quelque temps encore votre livre vous obligera de vous souvenir. Mais après ?… J’ai cette grâce à vous demander : vous m’en enverrez tout de suite les premiers feuillets manuscrits, n’est-ce pas ? Hâtez-vous. Ils ne me quitteront jamais ; où que j’aille, même dans la terre, je les emporterai avec moi… Oh ! la triste chose que le roman de ce roman : il est aujourd’hui le seul terrain où je me sente sûre de vous rencontrer ; il sera demain tout ce qui survivra d’une période à jamais finie…

DJÉNANE.


André aussitôt envoya les feuillets demandés. Mais