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Le lendemain donc, il risqua une de ces lettres signées Kiamouran, pour s’informer de la fièvre de Mélek et demander si la promenade à la mosquée de la montagne tiendrait toujours. Et il reçut le soir un mot de Djénane, disant que Mélek était couchée avec beaucoup plus de fièvre, et que les deux autres ne pourraient s’éloigner d’elle.

Seul, il voulut la faire quand même, cette promenade, le 5 octobre, jour qu’ils avaient fixé pour monter là une dernière fois ensemble.

Et c’était par un temps merveilleux de l’automne méridional ; les bois sentaient bon, les abeilles bourdonnaient. Aujourd’hui, il se croyait moins attaché à ses petites amies turques, même à Djénane, et il avait conscience qu’il se reprendrait à la vie ailleurs, où elles ne seraient pas. Il lui semblait aussi qu’au départ son regret maintenant serait moins pour elles que pour l’Orient lui-même, pour cet Orient immobile qu’il avait adoré depuis ses années de prime jeunesse, et pour le bel été d’ici qui s’achevait, pour ce recoin pastoral de l’Asie où il venait de passer deux saisons dans le calme des vieux temps, dans l’ombre des arbres, dans la senteur des feuilles et des mousses… Oh ! le clair soleil encore aujourd’hui ! Et ces chênes, ces scabieuses, ces fougères aux teintes rougies et dorées, lui rappelaient les bois de son pays de France, à