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me mettre en scène, je ferais tout ce que vous voudriez ? Alors, exposez-les-moi bien, au contraire, vos idées, aujourd’hui même, et les dames-fantômes qui nous écoutent consentiront peut-être à y joindre aussi les leurs…

— Le roman ou le poème d’amour d’une Orientale ne varie guère, reprit la dame noire qui avait déjà parlé. Toujours ce sont des lettres nombreuses et des entrevues furtives. L’amour plus ou moins complet, et, au bout, la mort ; quelquefois, mais rarement, la fuite. Je parle, bien entendu, de l’amour avec un étranger, le seul dont soit capable l’Orientale cultivée, celle d’aujourd’hui, qui a pris conscience d’elle-même.

— Combien la révolte vous rend injuste pour les hommes de votre pays ! essaya de dire André. Rien que parmi ceux que je connais, moi, je pourrais vous en citer de plus intéressants que nous, et de plus…

— La fuite, non, interrompit Djénane, mettons seulement la mort. J’en reviens à ce que je proposais l’autre jour à monsieur Lhéry ; pourquoi ne pas choisir une forme qui lui permette, sans être absolument en scène, de traduire ses propres impressions ? Celle-ci par exemple : « Un étranger qui lui ressemblerait comme un frère », un homme gâté comme lui par la vie, et un écrivain très lu par les femmes, revient un