dès que la conversation commença, les deux jeunes filles qui étaient venues un jour à Sultan-Selim, celles qui avaient eu une aïeule française et rêvaient d’une évasion ; Mélek les pressait de relever aussi leur voile, par bravade contre la règle tyrannique ; mais elles refusèrent, disant avec un gentil rire :
— Vous avez bien mis six mois, vous, à relever le vôtre !
Il y avait aussi une femme vraisemblablement jeune, qui parlait le français comme une Parisienne et que le livre promis par André Lhéry passionnait beaucoup. Elle lui demanda :
— Vous voulez sans doute — et c’est ce que nous voudrions aussi nous — prendre la femme turque au point actuel de son évolution ? Eh bien, — pardonnez à une ignorante petite Orientale de donner son avis à André Lhéry, — si vous écrivez un roman impersonnel, en le faisant tourner autour d’une héroïne, ou d’un groupe d’héroïnes, ne risquez-vous pas de ne plus rester l’écrivain d’impulsion que nous aimions tant ? Si cela pouvait être plutôt une sorte de suite à Medjé, votre retour en Orient, à des années de distance…
— Je lui avais exactement dit cela, interrompit Djénane ; mais j’ai été si mal accueillie que je n’ose plus guère lui exposer mes petites idées sur ce livre…
— Mal accueillie, oui, répondit-il en riant ; mais, malgré cela, ne vous ai-je pas promis que, sauf