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XXVIII


André était réinstallé à Péra depuis une quinzaine de jours et avait pu revoit une fois à Stamboul, dans la vieille maison de Sultan-Selim, ses trois amies qui lui avaient amené une gentille inconnue, une petite personne dissimulée sous de si épais voiles noirs que le son de sa voix était presque étouffé. Le lendemain, il reçut cette lettre :


Je suis la petite dame fantôme de la veille, monsieur Lhéry ; je n’ai pas su vous parler ; mais, pour le livre que vous nous avez promis à toutes, je vais vous raconter la journée d’une femme turque en hiver. Ce sera de saison, car voici bientôt novembre, les froids, l’obscurité, tout un surcroît d’ombre et d’ennui s’abattant sur nous… La journée d’une femme turque en hiver. Je commence donc.

Se lever tard, même très tard. La toilette lente, avec indolence. Toujours de très longs cheveux, de trop épais et lourds cheveux, à arranger. Puis après, se trouver jolie, dans le miroir d’argent, se trouver jeune, charmante, et en être attristée.