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avait ouvert l’autre jour la crypte sainte, et qui est un des rares jeunes hommes de la communauté.

Avec une lenteur hiératique, il s’occupe à rallumer des veilleuses dans des lampes d’argent. Sa pâleur, ses yeux d’illuminé inspirent presque une crainte religieuse, tant il ressemble, sur ces fonds d’ors atténués par les siècles, à quelque image byzantine du Christ, qui aurait pris vie… Oh ! l’étrange figure d’ascète, rayonnante et grave, dans le nimbe d’une chevelure rousse épandue magnifiquement !… Et bientôt, la ressemblance s’accentuant par degrés, dans ce milieu propice au rêve, on dirait, non plus une icône animée, mais le Christ lui-même, le Christ occupé humblement à d’humaines besognes, parmi des objets si anciens qu’ils contribuent à donner l’impression de son temps…

Il n’est cependant qu’un simple frère, voué aux petits soins inférieurs de l’église et à l’entretien du feu. C’est lui qui patiemment nous montre en détail le sanctuaire, découvrant les marbres, les mosaïques, les icônes d’argent et d’or, soulevant les housses de vieux brocart dont ces choses sont enveloppées.

Dans le lieu du tabernacle ensuite, c’est encore lui qui, sur la prière du Père Daniel, nous ouvre les deux grandes châsses d’argent envoyées jadis par