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À longs intervalles seulement, le va-et-vient espacé de quelques moines silencieux, dont les uns glissent au-dessus de nous, les autres au-dessous, et qui se hâtent de se terrer, par des portes comme des chatières, dans des niches en pisé rougeâtre — vieillards aux longues chevelures, ayant l’aspect de troglodytes qui rentreraient dans des trous de cavernes.

Des chats font comme nous ; errant sans bruit sur les petits toits abrités, sur le haut des petits murs, ils cherchent un peu de ce chaud soleil qui, de si bonne heure, va disparaître derrière les effrayantes masses de granit d’en haut.

Quel isolement ici, et quelle paix sépulcrale, avec la sensation de n’avoir autour de soi, de tous côtés et indéfiniment, que le linceul du désert !



À certaines heures du jour ou de la nuit : Pan ! pan ! pan ! pan ! Un moine, dans le clocher, frappe avec une mailloche, d’une façon spéciale et bizarrement rythmée, sur une longue pièce de bois qui est là suspendue — morceau de quelque arbre contemporain des empereurs grecs. C’est le synamdre, instrument des temps passés, dont l’usage vint aux