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VII

Et le troisième jour au matin, il y eut des tonnerres et des éclairs, et une grosse nuée sur la montagne, avec un très fort son du cor dont tout le peuple dans le camp fut effrayé.
(Exode, XIX, 16.)
Mercredi, 28 février.

Au milieu de la nuit, le fracas du tonnerre nous éveille, immense et terrible ici, dans cette vallée sonore, pleine d’échos. Un vent d’orage secoue nos frêles maisons de toile, menaçant de nous les enlever ; nos chameaux gémissent alentour, sous une ondée torrentielle et soudaine…

Le vent, plus encore que la pluie, est l’ennemi des nomades. Il faut se lever, faire enfoncer à coups de pierre tous les pieux de nos tentes, qui se gonflent comme des voiles, s’arrachent et se déchirent, — et puis attendre, se tenir prêt à n’avoir plus d’abri contre le froid déluge : détresses impuissantes d’infiniment petits, au milieu d’un déchaînement de forces souveraines…

Au-dehors, dans la vallée sinistre, qui s’éclaire de