Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/45

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

formant des couloirs, simulant les rues de quelque cyclopéenne ville détruite — et nous enserrent entre des parois sombres.



La halte méridienne est dans une de ces vallées sinistres…

Tandis que nous dormions là, sur nos tapis étendus, de sauvages clameurs de voix tout à coup se répercutent dans les pierres sonores. Ce sont nos gardes, nos chameliers, nos chameaux qui s’annoncent et qui vont passer ; c’est toute la plus lente caravane qui, chaque jour, nous suit le matin et prend de l’avance pendant notre repos de midi, pour nous précéder à l’étape du soir. Bêtes et gens ont l’habitude, au passage, de nous saluer par des cris, et aujourd’hui leurs voix s’exagèrent, éveillent des échos surprenants dans ces roches desséchées qui vibrent comme des bois morts.



Jusqu’à l’heure du Moghreb, nous continuons de cheminer dans d’étroites vallées sinueuses ; mais leurs parois changent de nature et de couleur ; elles deviennent en granit rose, veinées de larges bandes de granit bleu ou de granit vert.