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affranchie de tout l’instable de la vie ; la splendeur géologique d’avant les créations…



Le soir, d’une hauteur plus éloignée, nous découvrons une plaine sans bornes visibles, toute de sable et de pierre, tachetée de chétifs genêts roux. Elle est inondée de lumière, brûlée de rayons, et notre camp déjà dressé là-bas, nos infiniment petites tentes blanches, figurent des habitations de pygmées au milieu de ce resplendissant désert.



Oh ! le coucher de soleil, cette fois-là ! Jamais nous n’avions vu tant d’or répandu pour nous seuls autour de notre camp solitaire. Nos chameaux, qui font leur promenade errante du soir, étrangement agrandis comme toujours sur l’horizon vide, ont de l’or sur leurs têtes, sur leurs pattes, sur leurs longs cous ; ils sont tout lisérés d’or. Et la plaine est d’or entièrement, les genêts sont des broussailles d’or…

Puis vient la nuit, la limpide nuit avec son silence…

Et c’est, à ce moment, une impression d’effroi presque religieux que de s’éloigner du camp et de