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Dix heures ; les buées du matin ont fondu au soleil, qui est chaud aujourd’hui comme un soleil de mai.

L’amiral me délègue pour aller, en épaulettes et en armes, présenter au gouverneur japonais ses vœux de bonne année, et une baleinière du Redoutable m’emmène, à l’aviron, sur l’eau devenue très bleue.

La foule nipponne dans les rues est déjà en habits de fête.

Il me faudra deux coureurs à ma djinricha, pour la vitesse, et surtout pour le décorum, en tant qu’officier français ; — or, c’est difficile à recruter un jour de premier de l’an, car messieurs les coureurs font leurs visites et déposent leurs cartes. Quand j’ai trouvé cependant mon équipe, nous partons à toutes jambes avec des cris pour écarter le monde.

Et un monde si drolatique ou si gracieux ! Un monde à sourires et à révérences, qui s’empresse vers mille devoirs de civilité, et se complimente tout le long du chemin, avec un affairement bien inconnu aux premiers de l’an chez nous. Des mousmés vont par bande,