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nous aimons tous et que nous aurions été heureux de servir… Etc.

» LE COLONEL ***
» Commandant le *** régiment de marche. »


Quand j’ai relu cette lettre toute militaire, toute simple et vibrante aussi, que notre cher amiral a gardée parmi ses papiers de souvenir, la scène de ce départ de zouaves s’évoque soudainement à ma mémoire.

Un cadre sinistre, extra lointain : le golfe de Petchili. Une mer inerte, sous la lourdeur d’un ciel incolore qui semblait couver de la fatigue et de la fièvre. Et là tout à coup, dans l’atmosphère sourde, au milieu du silence accablé, une clameur magnifique et jeune ; quelques centaines de naïfs enfants de France, donnant de la voix éperdument, tandis que s’inclinaient sous leurs yeux, pour un adieu grandiose, ces loques sublimes qui s’appellent des drapeaux.

Ceux qui criaient ainsi à pleine poitrine étaient des matelots et des zouaves. Les zouaves s’en retournaient vers leur village natal, ou