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En sortant par la gauche de cette cour, où l’antique cheval de jade trône encore, on arrive comme autrefois sur l’esplanade aux maisons-de-thé et aux petits berceaux de verdure, d’où la vue embrasse tout Nagasaki, et sa baie profonde. Il y a même toujours cette « maison-de-thé des Crapauds[1] » où je venais avec madame Chrysanthème et la fine fleur des mousmés de son temps ; les crapauds sont restés aussi, ces mêmes crapauds-monstres qui étaient la gloire de l’établissement, et comme jadis leurs grosses voix de basse font couac ! couac ! dans les rocailles du gentil bassin. Ce qui a changé seulement, c’est le matériel de la maison ; on y voit aujourd’hui des tables de cabaret, des bouteilles de wisky, alignées avec du gin où de l’absinthe Pernod, enfin tous les breuvages civilisateurs dont notre Occident a doté le monde.

Plus haut que l’esplanade, des sentiers montent vers une région de calme et d’ombre qui a des airs de bois sacré. Des camélias à fleurs simples, presque grands comme nos ormeaux,

  1. La Donko-Tchaya.