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méchante, des flocons lents, qui avaient l’air de voltiger plutôt que de tomber.

Pour rentrer chez nous, il fallait traverser un quartier très spécial, qui se retrouve dans toutes les villes japonaises et s’appelle toujours le Yochivara.

À Nagasaki, le Yochivara est une longue rue, en pente si roide que les pousse-pousse risquent de s’y emballer, pour descendre. D’ailleurs une longue rue ; des deux côtés et d’un bout à l’autre, rien que des maisons très accueillantes, aux portes grandes ouvertes, aux vestibules fort galamment éclairés de lanternes peintes. Dans l’une quelconque de ces demeures, si l’on jette les yeux, on est toujours sûr d’apercevoir dès l’abord, à travers un léger grillage en bois, un salon d’apparence comme il faut, orné de délicates peintures murales représentant des fleurs, ou des vols de grues dans des ciels de nuance tendre ; là, quelques jeunes personnes aux yeux baissés, accroupies en cercle sur des nattes, devisent à voix basse ou fument innocemment des petites pipes, dont elles secouent de temps à autre la cendre, avec autant de grâce que de