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sique alors sautille et pleure, triste à faire couler des larmes, étrange à donner le frisson, — en attendant que paraisse l’autre, celle qui est moitié fée et moitié chat, mademoiselle Pluie-d’Avril avec sa traîne et ses révérences.

J’ai eu tort de venir ici ; c’est plus triste que ma chambre du Redoutable. Le son de cette guitare, on dirait le chant d’une sauterelle d’hiver, enfermée dans une cage de papier, une sauterelle de pays très lointain, dont la maigre voix évoquerait un monde inconnu ; je l’entends sans l’écouter, mais cela suffit à maintenir pour moi cette notion d’exotisme extrême qui avive ma nostalgie.

Alors, deux ans dans les mers de Chine !…. Il est fini, hélas ! le temps où j’étais angoissé, au cours des trop longues campagnes, par la crainte de ne pas retrouver la figure vénérée et chérie de Celle à qui depuis l’enfance on rapporte toutes choses, de Celle que personne au monde ne supplée… Cette crainte-là est aujourd’hui changée en une certitude, sur laquelle même un peu de résignation a commencé de venir. À ce point de vue-là donc, peu importe