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cette défense des Turcs que ma conscience m’oblige à soutenir. Ce qui d’ailleurs confirme ma foi dans la justice de ma cause c’est que, si j’entends à mes trousses les criailleries, les injures et les rires de ceux qui ne savent pas, j’ai pour moi les seuls témoignages qui comptent, ceux de presque tous les Français qui ont vécu sur les lieux et qui ont pu comparer entre elles les nations si diverses de l’Orient.

Je vais être maladroit sans doute en terminant mon plaidoyer par un point de beaucoup moindre importance. Je veux cependant dire encore ceci. Il n’y a pas dans l’espèce humaine que des spéculateurs et des électriciens, il y a aussi, et grâce à Dieu il y a de plus en plus, des artistes, des poètes, des rêveurs ; leur nombre même va croissant, à mesure que grandit l’épouvante de voir la laideur tout envahir. Qu’on leur laisse au moins et que l’on respecte pour eux, comme un éden, ce petit coin de la Terre qui est encore le moins défiguré par le modernisme. Il faut savoir gré aux pauvres Turcs d’enchanter encore un peu nos yeux par ce qui reste de leurs conceptions esthétiques. De Stamboul et d’Andrinople, ils avaient fait les villes merveilleuses que l’on sait. De ce Bosphore, qui eût été sans eux un