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ils n’ignorent pas que n’importe ce qu’ils feront en Europe, c’est toujours à eux que l’on donnera tort, c’est toujours eux qui seront les insultés et les spoliés, toujours eux qui paieront ; la coalition inavouée de tous les peuples dits chrétiens ne désarmera jamais. Et ils savent aussi que ces malheureux Arméniens ne cesseront pas, même aux heures les plus tranquilles, d’être contre eux de funestes et hypocrites délateurs. C’est à ces moments de fièvre rouge que l’Europe, qui se targue d’être la haute civilisatrice, a par trop mal agi en ne s’employant pas à calmer tout de suite la crise de ces grands enfants égarés ; or, au lieu de cela, des peuples chrétiens, des souverains chrétiens, désireux de pêcher ensuite en eau trouble, n’ont pas craint d’envoyer chez eux des agents provocateurs ? Parmi ces princes que j’accuse, et au premier rang, bien entendu, je citerai l’immonde Kaiser de qui on est toujours sûr de trouver les mains, ou plutôt les tentacules altérés de sang, partout où quelque plaie a chance de s’ouvrir ; je pourrais avec certitude en citer d’autres, mais la censure effacerait leurs noms. Hélas ! oui, les Turcs ont massacré ! Je prétends toutefois que le récit de leurs tueries a toujours été follement exagéré et