Page:Loti - La Mort de notre chère France en Orient, 1920.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’humanité. Des lettres continuent de m’arriver chaque jour, d’officiers, de soldats, même de prêtres catholiques, qui ont été à même de les connaître de près aux Dardanelles et qui restent stupéfaits de les avoir rencontrés tels que je les décrivais. Une des plus touchantes peut-être, est d’un petit soldat blessé qui fut longtemps leur prisonnier, qui est rentré par faveur spéciale et qui me demande de le prévenir quand les courriers seront rétablis avec Constantinople, pour lui permettre d’exprimer à nouveau sa tendre reconnaissance aux Turcs qui l’ont si fraternellement soigné. Dieu merci, malgré les entêtements qui ne raisonnent plus, la vérité sur eux commence à faire son chemin chez nous.

Pauvres Turcs ! Mais ils ont, hélas ! si je puis dire ainsi, les défauts de leurs qualités ; auprès de leurs vertus antiques, ils ont tout à coup le nationalisme aveugle, dès que l’Islam est plus directement menacé, dès que le Khalife a levé l’étendard vert et jeté l’appel d’alarme ; alors, comme des lions exaspérés, ils se déchaînent contre ceux que, depuis des siècles, on leur a dénoncés comme les plus dangereux responsables de tous les malheurs de la patrie. On pense bien que, si peu documentés qu’ils soient,