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Pour terminer, voici une anecdote, que je choisis entre mille, parce qu’elle est typique. En 1916, un hydravion français tomba désemparé en Palestine, près d’un poste militaire turc ; les officiers qui commandaient là, après avoir, avec courtoisie, fait nos aviateurs prisonniers, télégraphièrent au pacha gouverneur de Jérusalem pour demander des ordres, et il leur fut textuellement répondu ceci : « Traitez-les comme les meilleurs de vos parents ou de vos amis. » La recommandation était du reste prévue, car ils l’avaient devancée en accueillant comme des frères ces camarades tombés du ciel. Et quelques jours après, quand ils reçurent l’ordre de les diriger sur Jérusalem, les sachant dépourvus d’argent, ils se cotisèrent pour leur prêter de quoi faire confortablement le voyage.

Et enfin, sans crainte d’être désavoué par nos combattants de là-bas, j’ose prétendre que la plupart de nos chers soldats, revenus de la folle équipée des Dardanelles, auraient été fauchés sur les plages si les Turcs n’avaient mis beau coup de bonne volonté à les laisser se rembarquer : en général, ils cessaient le feu sur les canots français chaque fois qu’il n’y avait plus derrière eux quelque brute allemande pour les talonner. Ai-je besoin de rappeler aussi que