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par petits paquets et nul en Europe n’y faisait attention. — Mais allez donc raconter ça en France !…

Vous pouvez publier ma lettre tant qu’il vous plaira, et avec mon nom et mon prénom. Je regrette seulement de ne pouvoir faire davantage. Depuis que j’ai pu approcher les Turcs, je les aime ; ils ont toutes les qualités qui manquent à leurs « victimes ».

Voulez-vous que je vous cite deux petits faits personnels qui sont la contre-partie l’un de l’autre ? En juillet 1917, je dirigeais à Salonique la popote de notre dépôt. Un jour arriva à la cuisine un Turc qui vendait des légumes et je lui en fis acheter, trop heureux d’échapper pour une fois à nos fournisseurs grecs. Il accepta d’être notre fournisseur habituel et devint la Providence de notre popote. Vous ne pouvez vous figurer avec quelle sollicitude il s’occupait de nous, il se serait fait un scrupule, non pas d’augmenter d’un centime le prix des achats qu’il faisait pour nous, mais même de nous causer trop de dépenses quand, à force d’ingéniosité et de courses lointaines, il pouvait arriver à nous approvisionner à bas prix d’une façon qui rendait jaloux tous nos voisins.

La contre-partie, la voici : Je connaissais à