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celui de tous les soldats qui ont fait les campagnes d’Orient. Aujourd’hui, vous les défendez encore, vous les plaignez : qui sait si votre sentiment ne serait pas la meilleure des politiques ? Bien des politiciens le croient. Ce peuple du moins doit savoir que Loti ne l’a pas abandonné, et il n’est point ingrat : je doute que ce soit lui qui ait effacé votre nom et proscrit votre souvenir.

Qui que ce soit, pardonnez, souriez et consolez-vous. Personne au monde n’a le pouvoir de rompre les liens subtils de l’amitié que vous avez nouée avec le merveilleux Orient. On aura beau gratter sur les murs les caractères qui signifient votre nom mortel, vous ne sauriez plus être absent, ni des cimetières en pente de Scutari, ni d’Eyoub, ni des rives de la Corne d’Or, ni des jardins du vieux sérail. Vous errez autour des murs, vous êtes debout sur les tours carrées, fendues par le canon de Mahomet II, vous buvez l’eau de la fontaine qui est devant la porte de la Félicité. Dans les ruelles de Stamboul on rencontrera toujours le fantôme vagabond et mélancolique de Loti, à la recherche d’un autre fantôme.

ABEL HERMANT.