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Levantins ; un pays où l’on traite les affaires sans avoir besoin de rien écrire et où il suffit d’une parole donnée. Les mœurs y sont restées patriarcales et pures ; une hospitalité chevaleresque y est pratiquée comme une vertu courante même par les plus pauvres ; le respect des jeunes pour les vieillards, des fils pour les parents y dépasse absolument nos conceptions occidentales. La résignation devant la mort y est plus sereine que partout ailleurs ; en effet la perspective doit être sans effroi, d’avoir sa place, pour le grand sommeil, marquée par une petite stèle exquise, à l’ombre des arbres, au milieu du tranquille va-et-vient des vivants… Et sur les villages, sur les campagnes, plane une foi mélodieuse, que les muezzins traduisent en vocalises candides et claires.

La Cilicie, je me souviens d’y avoir voyagé à cheval, à l’époque de mon extrême jeunesse, sans armes, seul avec un domestique turc ; c’était à la saison où les fleurs roses des rhododendrons couvraient les montagnes. Partout, dans les moindres hameaux, nous étions reçus comme des amis.

Plus tard, j’ai gardé longtemps à mon service des montagnards de ce pays-là, Turcs de vieille souche et de vieilles coutumes, qui ignoraient