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il peut y avoir à Tibériade un millier d’autres habitants, chrétiens latins ou chrétiens grecs, arabes ou turcs.) Ensuite, nos ablutions faites dans l’eau fraîche du lac, délicieusement reposés, nous nous en allons à pied, au hasard, le long du désert de la rive, tandis que descendent les exquises tranquillités du soir. Une fois dépassés les deux petits dômes des bains chauds d’Emmaüs, il n’y a plus rien sur notre route ; solitudes autour de nous, solitudes aussi de l’autre côté de ces eaux calmes, sur le rivage de l’Est où ne vivent que quelques dangereux nomades, et sur le rivage du Nord, jadis tant aimé de Jésus, où n’habite plus personne : pays de gramens toujours, montagnes veloutées d’herbages, sans rochers et sans arbres, où les ruines mêmes, les ruines de tant de villes des âges passés, ne se retrouvent plus. Toutes les vapeurs diaphanes, qui aujourd’hui nous enveloppaient si légèrement dans les hauts parages du Hattinn, se sont condensées en nuages, séparées de la terre, et le soleil déjà très abaissé, qui les éclaire par en dessous, leur donne l’aspect d’un grand voile consistant, couleur de tourterelle ; il éclaire aussi, ce rouge soleil du soir, tout le bord oriental de la petite mer isolée, toute la côte d’en face, tandis que nous