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aux couleurs éclatantes, les cheveux pris dans des petits foulards de gaze d’argent et d’or où sont piquées des fleurs ; leur bible hébraïque à la main, elles chantent à voix aiguës dans ce silence de nécropole, elles chantent sur des airs de jadis les psaumes du roi David… Puis, il y a des intervalles de silence, dans des quartiers abandonnés qui rappellent la désolation de Pompéï ou d’Herculanum ; la ville est trop grande pour ces quelques habitants revenus du lointain exil, qui tentent d’y faire revivre un passé fini à tout jamais. Entrés par la porte du Nord, nous traversons Tibériade dans toute sa longueur ; il y a deux ou trois églises de moines chrétiens, une mosquée caduque et blanche, et deux synagogues — où, parait-il, de jeunes lévites en sont encore à étudier le ténébreux Talmud !… Puis, nous sortons par la porte du Sud, et nos tentes sont là, montées sur l’herbe et les fleurs, au pied des farouches remparts. Au débotté, un bon vieux prêtre à visage d’humble apôtre nous fait visite — Joseph Fréjat, curé latin — et nous convie à venir demain dimanche assister à la première messe dans sa très petite église. (En plus des juifs qui y sont en majorité,