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pains des apôtres 1. Il fut, dans tous les cas, le fatal champ de bataille où s’effondra en une journée le royaume merveilleux des Croisés de Palestine ; c’est là qu’ils furent fauchés tous, un jour brûlant d’été, au soleil d’il y a sept siècles, les chevaliers de Saint-Jean et les chevaliers Templiers, les barons et les prélats de France traînant avec eux la vraie croix comme un talisman suprême. Sur ces cimes dénudées que desséchait le vent de juillet, le sultan Saladin avait attiré l’héroïque et folle armée du roi Guy de Lusignan ; — après la défaite ensuite, il reçut dans sa tente magnifique les vaincus épuisés par la soif et leur offrit des sorbets, rafraîchis avec de la neige que des courriers rapides avaient apportée de l’Hermon éternellement blanc. 
1 D’après saint Luc (IX, 10) et saint Jean (VI, 1), la multiplication des pains aurait plutôt eu lieu près de Belhsaïde-Julias, qui est au delà du lac de Tibériade par rapport à Jérusalem. Ils burent tous, le roi et ses fidèles seigneurs — sauf Renaud de Châtillon, que Saladin abattit d’un coup de poignard avant qu’il eût porté la coupe à ses lèvres ; puis, quand ils furent désaltérés, le sultan ordonna froidement le massacre de toute la chevalerie, et le sang des beaux guerriers nobles arrosa l’herbe jusqu’au soir. Sept siècles ont coulé depuis