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Nous arrivons enfin à l’un des points culminants de Galilée, découvrant une fois de plus en avant de nous d’autres régions à parcourir ; des régions grandes, vides, silencieuses, qui ont un calme, de douce mort ; elles descendent, elles descendent, ces régions nouvelles, par des séries d’ondulations géantes qui sont des collines étagées ; sous le velours uniforme de leurs herbages, toutes leurs lignes paraissent comme fondues, et elles dévalent mollement vers quelque abîme lointain qui doit être la mystérieuse mer de Tibériade… Nous sommes ici au flanc du mont Hattinn, dont le sommet tout près de nous se dresse d’une montée abrupte, mais qui est garni jusqu’en haut, adouci comme la contrée entière par une couche d’herbes et de fleurs. Envahissantes, souveraines, elles règnent partout, les mêmes herbes et les mêmes fleurs ; dans les replis des terrains, dans les zones humides, des amas de pâquerettes s’arrangent en grands cernes blancs, tandis que, sur les hauteurs plus pierreuses, c’est toujours l’éternel et délicieux assemblage des marguerites jaune pâle et des lins roses. Nous plongeons jusqu’aux genoux dans l’épaisseur des foins — et il y en a de pareils à perte de vue de tous côtés. Un voile de printemps est au ciel, un voile de vapeurs ténues, comme pour tamiser un peu le soleil sur ce revêtement