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la route à peu près possible qui relie Nazareth à Khaïfa : c’était imprévu, ces voitures, pour nous qui arrivions à travers champs, par les vénérables chemins de Sichem et de Béthel — familiers à l’enfance de Jésus lors de ses pèlerinages annuels à Jérusalem. D’ailleurs, il doit rester ici bien peu de chose de la bourgade de jadis qui fut si hostile au Christ et qui, en son temps, était si dédaignée. Son nom seul demeure, ce nom qui est pour les Arabesd’aujourd’hui un terme général de mépris servant à désigner les chrétiens… « Nazaréen ! » dans le sombre Moghreb, je me rappelle avoir été souvent nommé ainsi, et avec quelle nuance hautaine ! Après le Christ, Nazareth, comme on sait, continua d’être obscure jusqu’à l’époque de Constantin, où elle vit les premiers pèlerinages et les premières églises. Plus tard, pendant la longue tourmente des croisades, elle reçut Tancrède, Saladin, puis Saint-Louis ; détruite enfin à la chute de l’empire des Francs, elle fut déserte pendant près de quatre siècles, jusqu’aux époques plus tolérantes où les musulmans commencèrent à permettre aux chrétiens d’y revenir et d’y relever les ruines de leurs sanctuaires. Elle est actuellement peuplée de huit ou dix mille âmes, dont les deux tiers au moins