Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/27

Cette page n’a pas encore été corrigée

encore, qui marchent d’une allure souple et lente, d’une belle allure de fauve. Pour nous mieux garantir des ondées d’avril, nous tenons à acheter ici certains burnous appelés « burnous de Naplouse » et renommés dans cette partie de la Palestine. Et, tandis que nous sommes arrêtés devant un vendeur, nous amusant au perpétuel marchandage oriental, un vieux turban s’approche, d’abord trompé par notre aspect ; puis, surpris de nous entendre entre nous parler une langue inconnue, il demande à notre guide : — Qu’est-ce que c’est que ces gens-là ? — Des Français, mon père. Alors, d’un ton très entendu, le Naplousien reprend : — Oh ! oui, je vois bien ; mais, des Français chrétiens ou des Français mahométans ? Évidemment, il se représente la France, comme la Syrie, partagée entre le christianisme et l’islam… Quand nous rentrons, cheminant vers le monastère par les petites rues encaissées et profondes, c’est l’heure du Moghreb, et au-dessus de nos têtes, partout, d’invisibles muézins chantent ; leurs voix claires, les fugues exaltées de leurs invocations, du haut du ciel gris et fermé, tombent surnous avec la pluie.