Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/217

Cette page n’a pas encore été corrigée

déroule devant nous ; les grosses nuées sont chassées toutes vers les cimes d’où nous venons, puis retombent par derrière et disparaissent. Nous voyons encore les régions d’en bas dans des perspectives un peu anormales, les collines comme aplaties sur le sol, et la mer, redevenue bleue, comme soulevée trop haut dans l’air. Elles sont d’une intense couleur verte, ces collines inférieures, que recouvrent des bois de pins lavés par les grandes pluies. Beyrouth aussi s’indique bientôt, très jolie encore à de telles distances : myriades de maisons blanches ou roses sur une pointe qui s’avance au milieu du bleu de la mer. Et l’éclat des nuances orientales, peu à peu revenu, est un pur enchantement après les sombres grisailles dont nous sommes à peine sortis. Nous rejoignons la caravane des gens de Bagdad, nos voisins de la nuit dernière. L’un des chameliers, qui chemine un instant près de moi, n’avait jamais quitté ses déserts et s’extasie devant cette ville lointaine, devant cette verdure, surtout devant cette chose bleue qui ne finit plus : la Méditerranée. — Combien de temps encore, demande-t-il, avant d’arriver là-bas ? — Trois heures pour nous qui sommes à cheval ; quatre ou cinq heures pour vous, à l’allure lente de vos chameaux.