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se replient une fois de plus pour le changement de chaque jour, passe et défile tout ce qui s’en va aux champs, toutes les bêtes qu’emmènent les bergers, myriades de chèvres noires, ânons, chamelles avec leurs petits — et, ici, il paraît bien humble et bien sauvage, ce train de la vie matinale d’aujourd’hui, auprès des débris qui restent d’un passé d’inconcevable splendeur païenne… Et la colonnade, là-bas, qui a vu lever tant de soleils, qui a regardé tant de commencements de jour, mutilée, triste et grande, regarde encore celui-ci…Nous marchons pendant des heures sur la route unie et droite, où s’étonnent nos chevaux habitués aux sentiers de traverse. C’est dans d’immenses plaines d’orges et de pierres absolument sans arbres, entre deux chaînes de montagnes parallèles — le Liban à droite, l’Anti-Liban à gauche, l’un et l’autre couronnés et marbrés de neiges. Nous sommes cinglés sans merci par un vent âpre et froid. Des neiges, des neiges de tous côtés, et, à la base des montagnes, s’étendent d’autres marbrures presque également blanches, qui sont des zones de marguerites. Après les grandes ruines, bientôt disparues, nous rencontrons encore, au bord d’un champ, un étrange