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chapeaux à plumes pour chameaux, têtières extravagantes ornées de glands, de clochettes et de petits miroirs où joueront en route les reflets des soleils. De cinq cents lieues à la ronde, du fond des déserts, on s’approvisionne dans ce prodigieux bazar. Alors c’est une babel de discussions, un musée de visages et de costumes. Des bédouins, des Syriens, des Druzes ; des Turcs en robes de soie de toutes couleurs ; de nobles émirs entièrement vêtus de cachemire indien ; des figures lointaines, des yeux de mystérieuses ténèbres, et des têtes inquiétantes, énormes sous l’enveloppement des turbans ou des voiles. Dans les parties moins éclairées où se vendent les soieries, les femmes affluent comme des légions de fantômes. Chrétiennes enveloppées de longs suaires blancs, mais laissant voir leur joli visage et leurs noirs cheveux où sont piquées des roses naturelles. Musulmanes pareillement drapées, mais dans des soies de nuances vives, et les traits cachés sous d’impénétrables mousselines sombres où deux trous sont percés pour les yeux comme dans les cagoules ; — souvent elles portent au cou, celles-ci, des bébés adorables, aux yeux déjà peints et allongés jusqu’aux tempes, aux étonnants minois de poupée.