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un mélancolique hameau druze, très solitaire, très perdu, appelé Kefr-Haouar. Nos mules, qui, à notre grande inquiétude, ne nous ont pas dépassés pendant la halte méridienne, ne paraissent pas encore. Se sont-elles trompées de chemin, ou bien nous les a-t-on prises, avec nos bagages et nos tentes ? N’ayant pas d’abri, nous nous asseyons sur des pierres pour attendre. La région est encore extrêmement élevée, voisine des grands sommets glacés ; un souffle qui vient des neiges nous transit, après la marche du jour. Les hommes du hameau — dix ou douze figures demi-sauvages dans les plis enveloppants de leurs voiles bruns ou rouges — viennent s’informer d’où nous arrivons, puis s’asseyent à l’écart. Sept petites filles descendent ensuite, se tenant par la main, presque toutes délicieuses : voiles de mousseline blanche, longs pantalons à la syrienne ; vestes jaunes, vert d’eau ou roses, très courtes, finissant sous les bras. Elles s’asseyent aussi et nous regardent. Nous sommes dans un cimetière sans enclos, où les tombes s’espacent sur une herbe courte ; pauvres tombes de village, faites avec de la boue durcie, en forme de cercueil, une petite stèle à chaque bout comme une paire d’oreilles dressées.