Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/134

Cette page n’a pas encore été corrigée

étranges : un ciel tout bleu, des cimes uniformément zébrées de blanc cru et de rouge sombre. Et les ruissellements d’eau froide, les cascades emplissent le silence d’un bruit continu comme celui des grèves. De ces hauteurs, nous avons par instants vue à vol d’oiseau sur la Gaulanitide et l’Iturée (aujourd’hui le Djaoulan et le Djedour), contrées encore mystérieuses qui ont échappé aux explorateurs modernes ; depuis le temps des Croisades, où elles formaient le « pays de Suet » relevant des princes de Galilée, on ne sait plus guère ce qui s’y passe. D’où nous sommes, elles semblent de confuses tourmentes de basalte. Et enfin les plaines de Damas s’ouvrent devant nous, très désolées, sous des aspects de déserts gris. Cela nous surprend, de voir le pays tant s’assombrir aux approches de cette « Reine d’Orient », chantée par les vieux poètes et vers laquelle nos imaginations commencent d’être tendues… Pas un arbre, pas un village dans ces plaines ; à peine quelques zones verdies par les herbes ; et des pierres, des pierres indéfiniment, un monde de basalte comme le Djedour. Il est quatre ou cinq heures du soir quand nous arrivons au lieu fixé pour notre campement de nuit :