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rayons et plus de couleurs… Alors, avant cela, on n’y voyait donc pas bien ?… De quelles ténèbres donc vient-on de sortir ? Et quelle est cette fête de clartés blanches ou de clartés d’or, qui, en silence et sans qu’on l’ait commandée, a l’air de partout commencer ?…

Ici, dans le vieil Orient des tombeaux, sur la poussière des humanités disparues, elle dure sans trêve, la morne fête ; seulement on l’oublie, sitôt que l’on s’en retourne vers le Nord, et c’est une surprise ensuite, chaque fois que l’on revient dans ces climats, de la retrouver pareille. Toujours elle rayonne sur ces mêmes vieux golfes chauds et languides, sur ces mêmes vieux rivages de granit ou de sable, sur ces ruines, sur ce monde de pierres mortes qui garde le mystère des races bibliques et des religions ancestrales, — tellement que, dans nos imaginations d’un jour, elle s’associe, la morne fête de lumière, aux antiques légendes sacrées, et que toutes ces choses arrivent à nous donner des illusions de stabilité, de durée presque sans commencement et ne devant pas finir…

Or, tout ce passé biblique, dont l’antiquité relative nous fait illusion et nous donne confiance, est né d’hier, si on le compare un peu aux effroyables passés du Cosmos. Et tout ce rayonnement, pour nous superbe et dont nos yeux s’enivrent, n’est que l’effet transitoire de notre petit soleil, en voie de lentement s’éteindre, sur une zone encore privilégiée de l’infime petite Terre, qui